Le bouddhisme n'existe pas
Par frederic baylot le jeudi, novembre 3 2011, 01:32 - Dharma - Lien permanent
Eric Rommeluère a une façon très claire et simple de présenter oralement le dharma et qui est à la fois ni simpliste, ni facile à entendre. En effet elle demande d'accepter de sortir de notre zone de confort et de nous remettre en cause. Thomas d'Ansembourg titre d'ailleurs un de ses livres sur la Communication non-violente : « Être heureux ce n'est pas nécessairement confortable ». Et justment l'écoute du dharma nous amène à sortir de nos différentes stratégies existentielles de fuite.
L'écriture d'Éric Rommeluère reflète cette façon orale de transmettre le dharma, d'une manière encore plus ciselée pour offrir une lecture toujours plus fluide. Les chapitres sont courts et précis et en même temps il y a comme une montée en puissance symbolisée par le nombre de pages par chapitre qui va crescendo, jusqu'à nous parler du bouddhisme, différent du dharma , de l'herméneutique, du Bouddha et principalement du courant du bouddhisme agnostique point d'orgue de sa démonstration, pour finalement revenir à des chapitres plus courts.
Et cette progression n'est pas innocente puisque dans son livre (et c'est manifeste dans son enseignement en général, même s'il ne le dit pas toujours frontalement) Éric défend une vision mystique, non essentialiste et narrative du dharma.
Mystique : car c'est une expérience inexprimable du soi éprouvant soudainement le néant de son existence. Moment de sagesse folle où tout se défait en soi-même dans un sentiment paradoxal riche et joyeux de renoncement à maîtriser toutes les forces à l'oeuvre dans sa propre vie et qui simultanément nous entraîne dans une parfaite présence joyeuse à la vie. Au delà de la méditation ou de l'écoute des textes bouddhistes, on peut vivre ce type de moment lorsqu'on contemple, allongé dans l'herbe en montagne, la voûte céleste nocturne en été. On se sent tellement insignifiant et parallèlement en pleine communion avec cet espace, cette nature, on se sent petit et loin et en même temps si proche de ces étoiles.
Non essentialiste, Éric Rommeluère parle d'une anti-métaphysique, car l'adepte de la Grandeur, celui qui suit la voie du Bouddha avec magnanimité, reconnaît qu'il n'existe aucun fondement sur lequel se reposer. Il accepte sa fragilité, il accepte de n'être « rien » et de cette reconnaissance naît une expérience réelle de la vie où « rien » n'est exclu, tout est embrassé, toutes nos émotions, nos perceptions, nos sensations, nos pensées, perturbatrices ou agréables, car telles sont les matières premières de notre vie.
Enfin métaphorique car seule la vision narrative du monde permet une compréhension de celui-ci et de soi, alors que toute description complète de la réalité est impossible. D'un point de vue systémique on dirait que seule la métaphore nous permet d'agir par une compréhension analogique du système car il nous est impossible d'atte(i)ndre une compréhension totale d'une vie qui est trop complexe pour être englobée intellectuellement.
En fait nous attendons bien souvent de l'enseignement bouddhiste qu'il nous apporte une lumière sur le monde pour moins souffrir, alors qu'il nous demande d'éclairer nous-mêmes ce dernier, en oeuvrant au bénéfice des êtres vivants.
Il y a bien un « nouveau bouddhisme » qui semble sortir en occident, mais il ne peut être que le fruit de la réponse au monde tel qu'il est, par des bodhisattvas qui s'engagent d'une manière éveillée dans l'existence en fonction de leurs contextes de vie. Le Bouddha symbolise cet éveil à la certitude que nos croyances, nos représentations, nos désirs déforment le réel et nous enferment sur l'image de nous-mêmes, ce n'est donc pas un renoncement au monde qui nous est demandé, mais à nos peurs et à notre inconscience et au contraire un engagement dans le monde, tel sera d'ailleurs le sujet du prochain livre d'Éric Rommeluère
(cliquer sur la couverture pour accéder à la présentation "éditeur")
Commentaires
Bonjour Frédéric,
Le titre est très bien choisi.
J'ai pas mal de bouquins qui attendent ma lecture, mais je songerai à celui ci pour plus tard.
Je n'ai qu'à retourner sur ton site,pour le retrouver.
J'ai lu le 1er tome de Jésus et Bouddha ; quel humour dans cette histoire, j'aime aussi beaucoup les dessins et ce petit format inattendu d'une bd.
Bonne journée.
BISES
Le Bouddhisme n'existe pas..
S'il existait "je" l'aurait rencontré..
Voilà comment d'une manière peut être un peu concise ce titre résonne en moi (ce qui bien sûr demeure souvent confus pour le raisonnement.)