Dans les semaines et les mois qui ont suivi, une vague d’immolations ou de tentatives d’immolation par le feu a déferlé sur le monde arabe puis dans les régions tibétaines occupées par la Chine, faisant de 2011 une année tristement record en la matière. L’acte de Mohamed Bouazizi a été imité à plusieurs reprises en Tunisie, en Algérie, en Egypte, en Mauritanie et même jusqu’à Oman, autant de pays à tradition musulmane où le suicide est pourtant formellement proscrit. Une douzaine de personnes se sont sacrifiées durant les révoltes arabes pour protester contre des régimes qui privent leurs peuples de leurs droits politiques et sociaux.

Trois mois après le succès des révoltes en Tunisie et en Egypte, cette forme de contestation radicale a gagné le Tibet. Depuis mars 2011, douze moines et nonnes bouddhistes se sont auto-immolés. Au moins sept d’entre eux sont morts, en silence, dans l’indifférence quasi générale, déplorait le premier ministre tibétain en exil Losang Sangay lors sa récente visite en Suisse. L’indignation de certains pays – dont le nôtre – face à ces immolations ne suffit pas à empêcher Pékin de resserrer l’étau sur la population tibétaine.

«Les Tibétains ont recours à de tels actes désespérés parce que la situation est désespérée», a insisté le successeur politique du dalaï-lama en regrettant que la communauté internationale ne porte pas autant d’attention à ces actes qu’au «printemps arabe». Quant au chef spirituel du peuple tibétain, il a rejeté la demande de Pékin de condamner les auto-immolations. Au contraire, le dalaï-lama, qui estime que «le génocide culturel» mené par la Chine au Tibet est à l’origine de cette récente vague d’immolations, a même tenu un sermon pour honorer la mémoire des victimes.

Cette forme extrême de protestation sociale et politique est plus que jamais d’actualité. Elle est toujours dramatique, mais pas nouvelle. De 1963 à 2002, 533 auto-immolations ont été rapportées par les médias occidentaux.

Yannick Van der Schueren

VIA TRIBUNE DE GENÈVE

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