“C’est une fille courageuse et très passionnée”, affirme à l’AFP “Abir”, une militante libanaise des droits de l’Homme et amie de Razan qui préfère utiliser un pseudonyme.

Cette blogueuse américano-syrienne de 31 ans est accusée d’avoir “affaibli le sentiment national”, “créé une organisation qui vise à changer le statut social et économique de l’Etat” et “ravivé les dissensions confessionnelles”, selon le Centre syrien pour l’information et la liberté d’expression.

Elle est passible de trois à quinze ans de prison. Son cas rappelle ceux de blogueurs détenus en Egypte: Maïkel Nabil, condamné à deux ans de prison pour avoir critiqué les forces armées ou Alaa Abdelfattah, toujours en détention préventive.

Dimanche, l’avocat syrien des droits de l’Homme Anouar al-Bounni a affirmé à l’AFP que Mme Ghazzawi devrait être libérée dans les prochaines heures, contre une caution de 15.000 livres syriennes (environ 300 dollars). Cette libération n’était toutefois toujours pas intervenue en fin de soirée.

Trois jours avant son arrestation, à l’occasion d’un “vendredi de la colère” en Syrie, cette brune aux cheveux courts avait écrit sur son compte Twitter (@RedRazan): “Mon Dieu, faites en sorte que ça soit le dernier vendredi avec le régime du (parti) Baas au pouvoir”.

Sympathisante de gauche et de la cause palestinienne, féministe, Razan Ghazzawi animait depuis 2009 un blog, “Razaniyyat” –les pensées de Razan– et était très active sur Twitter, à l’image des milliers de jeunes, moteurs du “printemps arabe” en particulier à travers les réseaux sociaux.

“Appeler Assad à quitter le pouvoir est la seule façon de sauver la Syrie de la guerre civile et de la domination de l’Otan”, écrivait-elle le 2 décembre.

“C’est une blogueuse qui ne mâche pas ses mots, elle a fait son travail avec courage et ils la punissent pour cela”, estime Nadim Houry, de Human Rights Watch (HRW) à Beyrouth. “Il est évident que le régime d’Assad ne tolère aucune forme de dissension et il le prouve jour après jour”, ajoute-t-il.

Razan Ghazzawi a été arrêtée le 4 décembre alors qu’elle se rendait à Amman pour assister à un forum sur la défense du droit d’informer.

D’après les informations publiées sur Twitter par sa soeur Nadine, elle a été transférée deux jours plus tard à la prison d’Adra à Damas, et sa famille s’inquiète du risque de torture, alors que l’examen de son cas est repoussé de jour en jour.

“Je m’attendais à ce qu’elle soit arrêtée à tout moment, vu qu’elle n’utilisait pas de pseudonyme”, affirme “Abir”, qui l’a rencontrée en 2007 au Liban où Razan, déjà diplômée en littérature anglaise à Damas, préparait un master à l’Université de Balamand.

Ses amis insistent sur son “audace” face à un régime qui surveille de près la toile, alors que la répression du soulèvement populaire entamé mi-mars a fait plus de 5.000 morts selon une estimation de l’ONU.

“Elle insistait pour écrire son blog sous son vrai nom, affirmant que le régime ne l’intimiderait pas”, raconte “Hoda”, une autre militante libanaise qui a requis l’anonymat.

D’après elle, la jeune Syrienne militait sur tous les fronts, et a même fait un séjour en Egypte où elle a participé à des manifestations sur la place Tahrir au Caire, emblématique de la révolte qui a provoqué la chute de Hosni Moubarak en février.

Selon un proche de Razan qui a requis l’anonymat, “son arrestation signifie que les gens qui +pensent+ ne sont pas les bienvenus en Syrie”.

Quelques jours avant son arrestation, elle tweetait, comme dans un pressentiment: “Si quelque chose m’arrive,je veux que vous sachiez: le régime n’a pas peur des détenus, mais de ceux qui n’oublient pas les détenus”.

VIA GOOGLE ACTUALITES